INTERVENANT : Jacques Touchon, neurologue, Faculté de médecine de Montpellier, ancien doyen de la Faculté de médecine de Montpellier, membre de l’Académie des Sciences et Lettres de Montpellier
RÉSUMÉ :
Bien sûr, personne n'échappe au vieillissement, n'en déplaise aux marchands de "médecine anti-âge". Et même si, comme l'évoque Montaigne, "nous ne sentons aucune secousse lorsque la jeunesse meurt en nous", il faut savoir repérer précocement les signes de ce glissement progressif pour le rendre le plus lent possible.
Essayons tout d'abord de ne pas nous laisser impressionner par les images trop souvent négatives colportées par notre société esclave de la vitesse, de la performance et du rendement. En vieillissant, nous devenons plus lents mais pas moins créatifs. Les processus attentionnels s'affaiblissent et nous devenons plus sensibles aux interférences. Les fonctions exécutives qui nous permettent, entre autres, de planifier, de changer de stratégie, de faire une double tâche sont moins efficaces. Le langage s'altère discrètement, essentiellement dans les mécanismes de recherche du "mot juste". La mémoire reste longtemps performante surtout dans ses composantes sémantique et procédurale.
Toutefois ces modifications liées au vieillissement dit "normal" restent discrètes et n'ont rien à voir avec l'effondrement progressif et irréversible de la cognition qui caractérise la maladie d'Alzheimer. Le cerveau vieillissant "normalement" n'engage pas le sujet dans la dégradation mais dans une façon de vivre différente. La cognition se modifie avec l'avancée en âge induisant chez le sujet une autre façon d’être au monde, un style spécifique. Comme Cicéron, à ceux qui nous disent "tu as été", répondons "je suis".
Pour tenir cette fière position, certaines règles doivent être respectées: activité physique régulière, correction des facteurs de risque vasculaire, stimulation cognitive, richesse des contacts sociaux, régime méditerranéen...
Le cerveau est en perpétuelle réorganisation, nous le construisons jour après jour et cette œuvre ne se termine que lorsque nous mourons. Le phénomène de plasticité neuronale est à l'origine de ces possibilités de réorganisation. Plus un cerveau est stimulé, plus il s'enrichit en connections constituant ainsi une réserve cérébrale nous permettant de compenser pendant longtemps les effets du vieillissement "normal" comme pathologique. Le plus important est peut-être de rester le plus actif possible. La routine est en effet une tueuse de neurones et si demain ressemble trop à aujourd'hui je mets en danger mon cerveau.
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