Première Diffusion 05/12/2002
Les vins français menacés par la concurrence des vins du Nouveau Monde, américain, chilien ou australien ? Pas seulement ! Car un autre danger pèse sur les vins français : la fraude aux Appellations d’origine contrôlée (AOC). A.O.C. : en trois lettres, c’est la règle de production la plus stricte du monde, qui fait la réputation des vins français, notamment les célèbres grands crus classés de Bordeaux et de Bourgogne. C’est un décret de 1935 qui a institué les AOC, un règlement qui impose de respecter une origine géographique stricte et un rendement maximum de chaque pied de vigne pour obtenir le meilleur raisin. Un vin d'appellation d'origine contrôlée se vend au moins cinq fois plus cher que les vins de catégories inférieures, comme vin de pays ou simple vin de table.
Depuis quelques années des faits divers révèlent l’étendue des fraudes. Entre les vendanges « complétées » avec du raisin d’à côté, les surplus écoulés au noir, voire le grand cru fabriqué avec du vin de table, on parle de 10 à 15 % de fraudeurs. Toute la profession en pâtit et les grands acheteurs étrangers se méfient de plus en plus des vins français.
Mais au-delà des tricheurs sévèrement sanctionnés s’ils sont découverts, c’est l’ensemble des viticulteurs qui se retrouvent aujourd’hui sur la sellette. Certains, pour faire des économies d’exploitation, n’élèvent plus la vigne selon les règles de l’AOC. Au détriment de la qualité, ils font pousser un maximum de raisin pour vendre un maximum de bouteilles, et rajoutent des produits pour corriger le goût dans le secret de leur cave.
Face à la menace qui pèse sur les 4,5 milliards d’euros que le vin lui rapporte chaque année, la France mobilise sa « police de la vigne ». Douanes, répression des fraudes, gendarmerie, redoublent d’efforts. Les laboratoires d’analyse font désormais appel au test ADN et à la RMN (résonance magnétique nucléaire). Les agents de l’INAO, l’Institut national des appellations d’origine, qui contrôlent la qualité du vin, voient leurs prérogatives élargies. Désormais, ils ont les moyens de faire « déclasser » des parcelles de viticulteurs peu scrupuleux.
Stéphane Bentura, Richard Puech
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