Qu'est-ce qui a poussé l'Américaine Valerie Solanas à écrire un manifeste prônant l’éradication des hommes et à vouloir tuer Andy Warhol ? Retour sur une vie violentée, matrice d’une prose féministe radicale.
Le 3 juin 1968, à la Factory, elle a blessé grièvement Andy Warhol de plusieurs coups de feu, gagnant ironiquement le quart d’heure de célébrité qu’il promettait à tous. Connue à l’époque en tant qu’actrice, Valerie Solanas se définit comme une autrice. Elle a achevé en 1967 un brûlot misandre, Scum Manifesto, le premier terme signifiant Society for Cutting up Men, en français "société pour tailler les hommes en pièces" (ou pour les émasculer). Un texte écrit "du plus profond des marées puantes du patriarcat", dit-elle. Née en 1936 dans le New Jersey, elle en connaît un rayon sur la domination masculine. Battue par son grand-père, violée par son père – un inceste dont naîtra une fille qu'on fera passer pour sa sœur –, elle met au monde à 16 ans un fils, possible fruit d’une étreinte avec un marin de passage. Cette jeune fille intelligente se rebiffe alors, et cède le bébé à un couple infertile en échange de la prise en charge de ses études à l’université. Elle en sort avec une licence de psychologie et un profond rejet du sexisme académique. Direction New York où, dans l’effervescence de Greenwich Village, elle vivote, écrit et se prostitue. En mal de reconnaissance, elle fréquente Andy Warhol et sa cour, jouant dans ses films contre un cachet de misère. Elle se sent exploitée par l'artiste, et par son éditeur, qui lui a extorqué les droits de Scum Manifesto. Il ne publiera le texte qu’à la faveur du scandale.
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