A chacun son chemin.
« Je me demande, dit le petit Prince si les étoiles sont éclairées afin que chacun puisse un jour retrouver la sienne ». Chacun de nous possède selon l’expression consacrée, sa « bonne étoile » dans la voûte céleste. De même les chemins sont à la fois multiples et uniques.
Les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle illustrent bien cette vérité : un seul but mais plusieurs itinéraires pour s’y rendre à l’image des stries de la coquille qui convergent en éventail vers son extrémité.
En France, on compte quatre grandes voies, au départ de Paris, Vézelay, Le Puy-en-Velay et Arles. Il faut aussi citer la voie du Piémont pyrénéen, qui a conquis le statut de « cinquième voie ». Et les innombrables variantes de liaison, qui offrent au pèlerin un large choix.
Dans le sillage des voies jacquaires, de nombreux autres chemins de pèlerinage ont été tracés ou réhabilités ces dernières années. Ainsi le pèlerin peut-il choisir son itinéraire en fonction de ses goûts. En effet chaque chemin a une couleur spirituelle différente : l’amitié sur les chemins du Mont-Saint-Michel, la fraternité sur les chemins de St-Gilles, le partage sur les chemins de St Martin, la paix sur les chemins de Vezelay à Assise, l’ascèse sur le Trio Breiz, etc.
« Partir c’est mourir un peu » : ce célèbre adage s’applique parfaitement à la démarche du pèlerin qui abandonne sur le chemin ses certitudes, ses habitudes, et parfois jusqu’à son ancrage le plus solide. En sortant de sa zone de confort, celui qui prend la route accepte le risque de bouleverser sa vie.
Le pèlerinage qui illustre le mieux cette réalité est celui qui mène à Saint-Jacques-de-Compostelle. En effet lorsque le pèlerin a accompli ses dévotions à la cathédrale, il reprend son bâton de marche et il repart. Il n’aura pas achevé son voyage tant qu’il n’aura pas été jusqu’au Finisterre, aux confins de la Terre.
A cet extrême Occident, borne ultime où le soleil disparaît pour renaître à l’Orient, il brûle ses chaussures ou ses oripeaux, tout maculés de la poussière du chemin. Par ce geste il tourne la page du passé et ouvre celle de l’avenir. Puis il va chercher une coquille St Jacques sur la plage, ce coquillage qui fut l’instrument de son baptême devient, après une mort symbolique l’emblème de la renaissance. Purifié par les épreuves de la route, régénéré au sanctuaire de l’apôtre, il a conquis à cette dernière frontière, son passeport pour traverser l’ultime frontière.
En quittant leur terre natale, ils deviennent des étrangers. Tel est précisément le sens du mot « pèlerin », en latin peregrinus : celui qui va au-delà de son champ , au-delà des limites de son pays. Comme le nomade mû par la nécessité de trouver de la nourriture , change perpétuellement de campement, le pèlerin doit avancer sans trêve pour assouvir sa soif.
Le chemin est nécessaire mais c’est par son but qu’il acquiert sa signification. Le pèlerinage n’est pas une errance, mais une itinérance ; une progression qui a un sens. Et comme dit le dicton : « Même quand on part randonneur, on arrive pèlerin ».
Cependant, l’arrivée n’est pas la phase la plus facile du cheminement. Un sentiment étrange envahit le pèlerin lorsqu’il parvient en vue du sanctuaire. Alors qu’il avait commencé à s’habituer au rythme de la route, cet aboutissement marque la fin du voyage, et l’imminence du retour.
Il pressent portant que cette dernière étape est essentielle.
Avant de pénétrer dans le Saint des Saints, il faut donc pour se préparer, effectuer des rituels de l’approche.
Sur les chemins de St Jacques, à la Cruz de Ferro, le pèlerin dépose une pierre symbolisant ses péchés ; à Rocamadour, il gravit des escaliers ; pour accéder au Mont-Saint-Michel, il traverse une baie ;à Fatima, il parcourt à genoux le chemin dit « de la Promesse »
Puis parvenu dans l’espace sacré, le pèlerin effectuera les rituels de la rencontre : la vénération des reliques, les processions, la confession, la messe et autres dévotions. Il n’a jamais été aussi proche du mystère qui l’a entraîné sur la route : parvenu avec un pincement au cœur, au terme de son voyage, il est désormais un pélerin accompli.
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