Des milliers de Libyens ont défilé, vendredi dans les rues de Benghazi, pour fêter le deuxième anniversaire du début de la révolte populaire qui a renversé Mouammar Kadhafi. FRANCE 24 a assisté aux festivités, entre souvenir et contestation.
Ils étaient des milliers à venir célébrer, vendredi, les deux ans de la révolution à Benghazi et à Tripoli. À pied ou en voiture, brandissant des drapeaux et scandant des slogans à la gloire des "martyrs de la révolution", de nombreux Libyens ne souhaitaient pas manquer les festivités.
Si la date officielle de l'anniversaire a été fixée à dimanche, les manifestations ont débuté deux jours plus tôt pour rendre hommage à l'avocat Fatih Terbil. Son arrestation le 15 février 2011 a été l'étincelle à l'origine du soulèvement qui, huit mois plus tard, a entraîné la chute du régime de Mouammar Kadhafi.
Des festivités qui font place aux critiques
L'atmosphère était festive mais les manifestants étaient aussi là pour se souvenir de ceux qui se sont sacrifiés pour le pays. Interrogée par FRANCE 24, une femme raconte : "Nous sommes ici pour nous souvenir de tous ces gens qui ont perdu la vie quand Benghazi s'est soulevée. Sans eux nous ne serions pas ici ce soir."
L'ambiance de fête n'a pas empêché des manifestants à Benghazi de critiquer les nouvelles autorités, en revendiquant en particulier plus de décentralisation du pouvoir et une plus grande mobilisation de l'armée et des services de sécurité. Partis de Benghazi, des appels à manifester à partir du 15 février ont été lancés par plusieurs groupes libyens, dont des partisans du fédéralisme et des organisations de la société civile.
Les revendications vont du "bannissement des responsables de l'ancien régime" à "la chute du (nouveau) régime", en passant par la dissolution des milices armées qui font la loi dans le pays depuis la chute de Mouammar Kadhafi.
Sentiment de délaissement
Beaucoup d'habitants de Benghazi se sentent délaissés par les autorités de Tripoli. "Nous voulons que les hommes politiques s'intéressent à Benghazi. Nous sommes très marginalisés ici alors que c'est ici que la révolte a commencé. Sans Benghazi, la Libye ne serait pas libre", confie à FRANCE 24 l'un de ses habitants.
Pour de nombreux opposants le gouvernement est incapable d'assurer leur sécurité. Les habitants ont donc conservé les armes de la révolution."Le jour où nous seront en sécurité, où les forces de sécurité prendront le relais, alors tous les habitants de Benghazi rendront leurs armes sans hésiter. Mais pouvons-nous vraiment les rendre alors que nous ne sommes même pas en sécurité devant chez nous ?", s'interroge l'un d'entre eux, dans un entretien accordé à FRANCE 24.
Sécurité draconienne
Accusant de nouveau les pro-Kadhafi de vouloir "semer le chaos", cette fois-ci durant les cérémonies marquant le deuxième anniversaire de la révolution, le gouvernement et des ex-rebelles ont annoncé des mesures de sécurité draconiennes et menacé de recourir à la force contre tous ceux qui "tenteraient de perturber les festivités".
Ainsi, les frontières terrestres avec la Tunisie et l'Égypte sont fermées depuis jeudi et jusqu'à lundi, et les vols internationaux sont suspendus, à l'exception de ceux des aéroports de Benghazi et Tripoli. La Libye avait déjà décidé fin décembre de fermer ses frontières avec ses quatre voisins du Sud.
Depuis quelques jours, des points de contrôle ont été érigés aux principaux carrefours et entrées de Tripoli. Les mêmes dispositions ont été mises en place à Benghazi, où des habitants constituaient des groupes d'autodéfense dans leurs quartiers.
Face à ces craintes, plusieurs organisations de la société civile, dont les partisans du fédéralisme dans l'est du pays, ont annoncé le report de leurs mouvements de protestation.
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