L’athlète grec réalisait sa propre nature. La valeur essentielle était l’harmonie, l’équilibre. L’homme moderne ne vit pas dans l’élément de la nature, il vit dans l’histoire. Le culte de la beauté, de l’accomplissement cède la place au culte de la performance. Le sportif est un avatar de l’homme prométhéen, celui qui sans cesse repousse les limites, ignorant l’hubris.
La nouvelle devise que personne n’ose énoncer c’est trop vite, trop haut, trop fort. Nous ne faisons plus progresser l’humanité par le record, nous entrons dans le post-humain et les athlètes deviennent les cobayes de cette post-humanité.
Le paradoxe est que nous sommes dans le monde de la performance avec cette idée nouvelle qu’il faut l’arrêter…Et si nous arrivons à fabriquer des corps en résorbant le décalage entre le corps humain faillible et la machine, c’est la liberté du savant qui se substituera à la liberté humaine.
La belle incertitude du sport serait ainsi balayée par l’alliance de la technique et de l’argent. Le sport sera conduit à résister parce qu’il y va de sa propre survie - quelque espoir est donc encore permis.
Malgré tout ce que je vois, ce que j’apprends, j’aime encore regarder les matchs et le Tour de France. Les scandales à répétition ne m’ont pas encore découragés. Le football reste un grand rendez-vous populaire et ce n’est pas la pire des choses que fait le peuple.
Alain FINKIELKRAUT est philosophe
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