L' Ambassadeur Maxime Lefebvre présente clairement l’évolution des relations franco-allemandes depuis 1945, conjuguant les approches géopolitique et historique. Il s'exprime à titre personnel.
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La rivalité franco-allemande a été structurante dans le système international et européen à partir de la formation de l’unité allemande en 1871. Bismarck créé un système d’alliances diplomatiques pour isoler la France et empêcher une revanche française. Après la Première guerre mondiale, l’Allemagne humiliée par le Traité de Versailles fait face à une France qui tente de maintenir sa position de prépondérance. Néanmoins, les années 1920 sont synonymes d’un rapprochement incarné à l’époque par Aristide Briand et Gustav Stresemann, respectivement ministres français (1925-1932) et allemand (1923-1929) des Affaires étrangères. Ils sont en fait les inventeurs du couple franco-allemand, au service de la paix. En 1945, la défaite de l’Allemagne nazie d’Adolf Hitler marque le début d’une nouvelle période qui peut être divisée en six étapes.
La première phase est celle de la réconciliation et du lancement du projet communautaire. Avant 1949, la France veut empêcher la résurgence d’un danger allemand mais la Guerre froide (1947-1990) déplace la menace principale vers l’Union soviétique. Avec la déclaration Schumann du 9 mai 1950, les Français initient la construction européenne en proposant de mettre en commun les industries du charbon et de l’acier des pays d’Europe de l’Ouest. Cette première Europe à 6 est occidentale et n’inclut que l’Allemagne de l’Ouest.
La deuxième phase est la création d’un couple franco-allemand qui repose sur une équation résumée par l’Américain Zbigniew Brzezinski : « À travers la construction européenne, la France vise la réincarnation et l’Allemagne la rédemption. » Pour l’une, la construction européenne est un levier de puissance, pour l’autre un moyen de se resocialiser et de récupérer sa souveraineté. Le Général C. de Gaulle et le chancelier K. Adenauer établissent un partenariat privilégié entre les deux pays par le traité de l’Elysée du 22 janvier 1963.
Le départ de de Gaulle annonce une troisième phase : l’élargissement et l’approfondissement de l’édifice européen. C’est aussi la période de l’Ostpolitik de Willy Brandt, qui mène une politique de rapprochement avec l’URSS et entre les deux Allemagne. Le couple franco-allemand est fort sous le président Valéry Giscard d’Estaing et le chancelier Helmut Schmidt (1974-1981) puis entre 1982 et 1995 entre François Mitterrand et Helmut Kohl. Ce sont les années de l’élargissement méditerranéen de la Communauté, où la France occupe désormais une position centrale. De nouveaux progrès dans l’approfondissement sont marqués par l’accord de Schengen en 1985 et l’Acte unique de 1986. Le partenariat bilatéral s’enrichit d’un Conseil économique et financier franco-allemand, d’un autre de défense et de sécurité et de la chaîne de télévision commune Arte.
La fin de la Guerre Froide entraîne la réunification allemande (3 octobre 1990) qui modifie l’équilibre de la relation malgré de nouveaux progrès européens (traité de Maastricht, février 1992). L’élargissement de l’UE aux pays neutres en 1995 (Autriche, Suède, Finlande) marque une évolution vers une Europe communautaire plus nordique et anglophone. Le positionnement géopolitique de l’Allemagne bascule avec l’arrivée au pouvoir de Gerhard Schröder en 1998 qui adopte une politique de défense des intérêts allemands, ce qui suscite des tensions dans le couple franco-allemand en 1999-2000.
Ces tensions sont surmontées par une nouvelle phase de rapprochement entre Jacques Chirac et Gerhard Schröder à partir de 2002 pour préparer l’élargissement à l’Est et refuser la guerre en Irak. Malgré les divergences politico-économiques, le couple franco-allemand joue toujours son rôle lors de la crise économique de 2008 avec N. Sarkozy-A. Merkel ou lors de la crise ukrainienne en 2013-2014 avec F. Hollande-A. Merkel.
Enfin, la dernière étape coïncidant avec le Brexit renforce le poids des deux pays (plus d’1/3 de la population de l’UE à 27, 55% du PIB de la zone euro) mais l’Allemagne apparaît comme la puissance prépondérante de l’Europe, moins intégrationniste, face à une France qui est en difficulté et semble plus demandeuse. Le traité d’Aix-la-Chapelle (22 janvier 2019) relance et rénove la relation, qui reste le trait d’union de la construction européenne mais doit aussi s’ouvrir aux autres partenaires européens et occidentaux.
Résumé par Joséphine Boucher pour Diploweb.com
Images, son et montage : Fabien Herbert.
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