Des produits Nutri-Score A - dont des frites surgelées ou de la pâte à tartiner - sont-ils forcément gages de bonne santé ? Faut-il y croire ?
Le Nutri-Score a pour but d'attribuer un score aux aliments en fonction de leurs nutriments. En clair, d'un côté, se trouvent les bons éléments : les fruits et légumes, les protéines et les fibres. De l'autre, les moins bons : les sucres, le sel, les calories et les graisses saturées.
Mais si on suit cette logique, des produits comme les frites surgelées ou la pâte à tartiner ont le score le plus élevé, c'est à-dire "A". Pourtant, ils ne sont pas forcément "sains". Tentons d'y voir plus clair.
Normal qu'avec un mauvais Nutri-Score - D - attribué au célèbre fromage de Herve, Jean-Marc Cabay, administrateur-délégué de "Terre de fromages", assure qu'en tant que fromager, il n'adhère pas complètement à la formule. "Il part d'une bonne initiative: donner des informations nutritionnelles au consommateur. Mais, par contre, vu la méthode restrictive qui a été choisie, on se retrouve avec des produits naturels, locaux et sains, qui sont mal cotés. ", estime-t-il.
Il nous explique que tous les fromages étant du lait - qu'on fait cailler grâce à l'action de la présure - , on a un seul ingrédient local et durable. Et malgré cela, le Herve se retrouve avec une cote D qui pourrait faire croire que ce n'est pas un produit sain pour la santé.
Colorants, acidifiants, édulcorants, aspartame, acesulfame k., mentionnés sur les étiquettes de certaines bouteilles de Coca-Cola, par exemple, sont ignorés dans le système. Ainsi que la transformation des produits.
D'après Pierre Garin, diététicien-nutritionniste, un score A ou B ne va pas spécialement "sauver la planète, bien au contraire". Et il met en avant l'éducation nutritionnelle: "expliquer aux personnes ce qu'elles doivent manger et la composition et l'aspect, la manière dont on fabrique les produits aussi."
Un emballage de céréales affublé du Nutri-Score A et un affichage BIO en vert, par exemple, fait croire qu'en mangeant un score A et un produit bio, on mange un produit sain. Pour lui, il n'en est rien, car ça reste un produit ultra-transformé. Il qualifie cette manière de procéder de nutriwashing. En effet, actuellement, nous savons que "qualitativement, les produits ultra-transformés amènent à des pathologies de civilisation, telles que l'hypertension, le diabète, l'obésité, le surpoids et ainsi de suite."
Vincent Delhomme, chercheur à l'UCLouvain, est beaucoup plus confiant: "Globalement, les études qui ont été faites sur des dizaines de milliers de produits montrent qu'en moyenne, il n'y a aucun doute sur le fait que les produits classés A ou B sont très majoritairement de meilleurs produits. Une fois de plus on parle de nutrition, ce n'est pas un jugement de valeur. Et les produits classés D ou E sont inversement des produits dont il faut limiter la consommation."
En Belgique, Test-Achats et le SPF Santé Publique soutiennent sans réserve le Nutri-Score.
Vincent Delhomme souligne que "Les états membres de l'Union européenne ne peuvent pas imposer la présence de cet étiquetage sur les produits. C'est un étiquetage qui est volontaire. Et donc l'idée serait de le rendre obligatoire sur tous les produits au niveau européen. Et c'est ce qui est en discussion aujourd'hui."
Le diététicien Pierre Garin y est férocement opposé: "Il ne faudrait certainement pas le rendre obligatoire et certainement pas faire croire aux personnes qu'en ayant un, deux ou trois logos, on mange sainement."
Sans l'accord de tous les pays européens, le Nutri-Score sur l'ensemble des produits d'alimentation n'est pas encore pour demain.
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